Proximité

 

 

Texte de François Soulages - Collection Carnets éditions ARGRAPHIE.

 

Extrait du texte du livre "Proximité"

Car la photographie, comme tout art, réinvente notre rée: elle rayonne en tous sens de façon interrogative et critique; elle nous permet de voir autrement le monde de l'imagination, le monde de l'imaginaire, le monde des autres images de l'art (peinturecinéma, métaphore littéraire, etc.), donc tout ce qui passe par les yeux et surtout par le psychique. Là photographie est un art, car elle nous invite à revoir autrement tout réel et toute représentation et car elle produit ainsi en nous des morceaux de fables et non des blocs d'idéologies. Nous sommes bien loin des photos - «documents», des photos - «vérités» et même des photos - «reportages»; la photographie ne nous reporte rien, ne nous rapporte rien; si ce n'est qu'elle nous reporte en arrière dans cette proximité perdue qu'est notre passé; si ce n'est qu'elle nous rapporte des questions et des dettes, des deuils et des éblouissements. Nous avons quitté les lieux étroits et utilitaires pour aller vers le temple du monde,  vers la contemplation critique des images. 

Ainsi, nos rêves et nos visions, nos fantasmes et nos désirs sont, par la photographie, transformés de l'intérieur et métamorphosés en œuvre autonome.

La photographie n'est qu'affaire de proximité proximité spatiale? proximité temporelle? proximité affective? Proximité esthétique, assurément

Tout homme est notre prochain, alors que peu d'élus sont et seront nos proches; notre intimité sera toujours réduite, car notre vie est courte, car notre mort est proche; le proche, c'est l'intime qu'un jour je tutoierai, le prochain, c'est tout homme, d'ici, de là bas et d'ailleurs; le proche me plonge dans l'existentiel et l'affectif, le prochain dans la morale et l'humanité. Or l'esthétique permet de passer du proche - parfois englué dans une affectivité infantile au prochain -figure essentielle de l'humanité universelle; donc de la trace du référent à la trace de l'universel.

FrançoiSoulages

Ile-de-France, février1987

 

 

 

Un Instant Singulier

 

Moments après moments, regards après regards. Il naît une envie de prendre ces lieux et d’en faire des photographies. Un instant singulier, dépossession de soi et se laisser entrainer dans un autre présent, celui du rêve et de l’évocation visuelle. Ne pas le vouloir, tout en sachant que c’est indispensable, que rien ne pourra l’empêcher.

C’est tout, c’est là.

Perception